Sagranade, sabrenade, sagrenade, sogronade ou sabronade (n.f.).- de l’occitan (périgourdin) sobronado ou sogronado. Ragoût fait de haricots blancs (de monjettes), de quelques tomates fraîches coupées en quartiers (la présence des tomates fraîches est un ingrédient obligatoire), d’un hachis de lard et d’aïl, de ventrèche, de jambon sec, dans lequel on glissait en fin de cuisson de grosses saucisses ou des confits de canards ou encore des boulettes de viandes ou des couennes de porc. Une lectrice de Lalinde m’indique que la seule viande qu’elle met dans la sabrenade, c’est de la ventrèche de cochon.
Après avoir servi les convives à pleines louches, l’usage voulait qu’on verse dans chaque assiette, sur le ragoût, un filet d’huile de noix. On déposait préalablement au fond de chaque assiette une tranche aillée de pain grillé.
On utilisait localement une variété rustique de haricots blancs, les haricots cocos qui étaient ronds.
En y regardant de près ce plat pourrait bien être considéré comme un cassoulet rustique. Il est moins consistant que le cassoulet de Toulouse, renvoyant au ragoût qui était la forme culinaire très commune dans la cuisine paysanne du Périgord, plat dans lequel on pouvait tremper le pain. C’est bien sûr un plat roboratif très typique de cette cuisine des travailleurs des champs. C’est un plat d’été et de fin d’été. En effet il est concomitant de la récolte des haricots, qui s’échelonne de juin à octobre et de la production de tomates de jardins, qui est une production estivale et de début d’automne. Il était servi au repas des battages notamment mais aussi au déjeuner des vandanges.
L’association des Pesqueyroux dans son livre 14 banquets Périgourdins, 123 recettes, donne une recette de la sobronade qui est une variante. Dans celle-ci, il y a du cèleri rave, mais aussi des pommes de terre. C’est une variante qui rappelle davantage une potée que le ragoût. Cette potée est décrite par La Mazille dans son livre La bonne cuisine du Périgord.
J’ai trouvé un plat cousin, curieusement rencontré aux Pays-Bas. Il y est connu sous le nom de sopbrood. Et on le traduirait littéralement par «trempette ». Pourquoi un cousinage entre notre sabrenade et la sopbrood des Pays-Bas ?
Le mot a deux variantes ortographiques importantes, c’est sabrenade ou sagrenade. Avec la lettre b, il a été rencontré en sud Dordogne et en vallée de la Dordogne, le mot avec la lettre g est rencontré dans le Périgord central, dans les cantons de Villamblard et de Vergt.
Voici la recette de la sobronade telle qu’on la faisait chez moi dans la ferme familiale dans mon enfance, pas loin de Lalinde (Dordogne):
Ingrédients : 400 grammes de haricots blancs, un hachis de lard avec aïl et persil, 4 tranches de jambon sec de pays, 4 belles tomates du jardin, 5 longes de ventrèche de cochon, 4 confits de canards.
Faire tremper 12 heures à l’eau froide les haricots secs.
Epluchez et coupez en quartier les tomates. Coupez en dés la ventrèche et la faire revenir à la poêle. Egouttez les haricots et les mettre dans une grande marmite, les recouvrir largement d’eau froide, ajoutez le jambon et les morceaux de ventrèche. Portez à ébullition, écumer, ajouter le hachis. Lorsque l'eau bout, laissez mijoter 30 minutes. Réduire et enlevez un bon quart du bouillon, faire un roux et le verser dans la marmite. Epluchez et coupez en quartier les tomates, les ajouter aux haricots, laissez mijoter à nouveau quinze bonnes minutes. Rectifiez l’assaisonnement. Ajoutez les quartiers de canard, laissez frémir pendant trente minutes. Servez avec des tranches de pain grillé et aillé. Faire couler un filet d’huile de noix sur chaque assiettée de vos convives.