Sur la Banne d'Ordanche.- Un des très beaux sommets du massif des monts Dore... Au-dessus de la petite ville de La Bourboule. Rando d'altitude sur le plâteau du Guéry. Ici on se croit au bout du monde.
Vu une étrange installation au sommet de la Banne d'Ordanche dans le cadre d'une des premières opérations de land art baptisée Horizons Sancy. Des balises en bambous, comme empruntées à une civilisation des peuples premiers. Le vent soufflait dans les installations qui hululaient. Cette flûte géante donnait le ton, mais aussi la peau d'un tambourin vibrait au vent... Il fallait monter au sommet simplement pour écouter ce concert venté. Drôle d'impression la nuit... On croyait entendre des loups sur les crêtes.
La procés d'un grand rêve.- Pièce écrite à Bourges pour se souvenir du procés des insurgés de 1848 qui eut lieu à Bourges en 1849. Rencontre avec Evelyne Loew, l'auteur du texte. Ci-après un extrait de la longue interview que j'ai faite de l'auteure.
Pourquoi Bourges… Est-ce parce que c’était la ville symbole de l’ordre ou de la réaction ?
Apparemment… Ils ne voulaient pas que ça se passe à Paris, il y avait encore risque d’émeutes. Et ce qui est impressionnant, ce sont les forces de police déployées à Bourges. Et ça paraît insensé par rapport à l’enjeu. Ils jugeaient seize ou dix-sept personnes et c’était des clubs républicains, c’était très limité, ce n’était pas de grands syndicats, de grands partis, c’était des forces d’idées. Il y a quand même un nombre incroyable de forces de l’ordre. La ville est en état de siège. Dans le journal local, ils parlent surtout du problème de ravitaillement et de logement des soldats et des troupes. Il y a trois escadrons du dixième régiments et dix wagons de gardes mobiles. Dans un journal on lit « toutes les rues sont occupées militairement ». Citation du Journal du Cher : « On ne rencontre dans nos rues que militaires de toutes armes, policiers étrangers » (...)
Photo: le Palais Jacques Coeur à Bourges, où eut lieu le vrai procès, mais aussi la lecture-théâtre de ces derniers jours.
(...) Dites-nous, cette Seconde République finalement elle est très à gauche. Elle instaure la journée de 10 heures, les ateliers nationaux…
Oui… Les ateliers nationaux, c’est déjà le traitement social du chômage. C’est la grande idée de Louis Blanc, la grande figure. Il voulait concevoir une organisation du travail. Et c’est un moment d’utopie et de grand développement du capitalisme. On est à un tournant, on ne sait pas trop ce qui va se passer. Il y a des forces qui sont pour l’organisation du travail, l’éradication de la pauvreté possible avec cette richesse nouvelle qui arrive de l’industrie… Et il y a une référence à la révolution française vue comme généreuse, mais n’ayant pas abouti à cause de la Terreur. Donc on revisite la Révolution française, voir Lamartine et l’histoire des Girondins. Ils se sentent investis. L’idée c’est de reprendre la Révolution française, la débarrasser du spectre sanglant de la Terreur, et ainsi continuer l’œuvre garce à la richesse produite par l’industrie. C’est ça qui est dans l’air du temps. Mais on est dans le vide le plus complet des moyens. Il n’y a pas d’organisation politique, de corporation. On est en retard par rapport à l’Angleterre où il y a déjà les TRADE-UNIONS . En France il n’y a rien… (...)
(...) Est-ce qu’on peut dire que c’est l’époque de la naissance du marxisme ?
Oui, justement Marx élabore ses théories…
Certes, Marx est là, mais est-ce que la société en a conscience ?
Oh non, pas du tout. Marx est un obscur chercheur… Non la société n’est pas au courant, mais par contre les idées marxistes s’élaborent à partir de 1848 complètement en rejet de ces utopies. On parle même à l’époque de communisme et de socialisme. Mais ça n’a pas du tout le même sens que de nos jours. Alors je ne l’ai pas mis volontairement… Parce que lorsqu’on disait les communistes, c’était les gens qui créaient des communautés. Donc ce n’est pas le même sens. Et même idéologiquement, ils étaient opposés. La pensée marxiste s’est constituée contre les courants communautaro-utopiques qui ont fondé des communautés ici ou là et qui ont plus ou moins perduré. Je vais m’intéresser à cela pour la seconde partie, je veux savoir ce que sont devenues ces communautés (...)
(...) Pour revenir aux événements, cette invasion de l’Assemblée le 15 mai 1848, est-ce une manip, est-ce une manière de préparer le retour d’un régime fort ?
C’est confus et justement dans les plus récents livres d’histoire sur cette période et sur ces grandes journées on a des certitudes. Les historiens jusqu’à une période assez récente étaient dans l’expectative. Les livres plus récents, parus depuis les années 2000, sont très clairs sur la théorie de la manipulation. Ils disent que les leaders républicains n’avaient aucune envie de renverser la République… Pour eux, le 15 mai c’est la venue à l’Assemblée Nationale pour porter une pétition pour soutenir les patriotes polonais, pas autre chose. Ce que j’ai lu, c’est que le dénommé Hubert qui était cité dans les accusés, qui n’était pas présent au procès et qui apparemment a été manipulé par la préfecture de police, c’est celui qui a brandi la pancarte sur laquelle on lisait « L’ASSEMBLEE EST DISSOUTE ». Ce qui était quand même la faute la plus grave. Parce que personne ne l’a dit, mais le Hubert en question a brandi cette pancarte. Et ce Hubert est venu vers Bourges pour témoigner au procès et on l’a arrêté en cours de route et on l’a empêché de venir témoigner. A-t-on pensé que si Hubert venait témoigner, ça ferait désordre ou que ce témoignage serait gênant ? En tous les cas c’est une affaire très louche… Et il est parti en Angleterre. La vérité, c’est que le 15 mai, les républicains rouges auraient pu faire un coup de force et ils ne l’on pas fait. En tous les cas ils ont tous été arrêtés le 16 mai. Là, le pouvoir profite de la manif pour en finir avec les leaders rouges. Donc les clubs républicains se sont retrouvés sans têtes pensantes et tout de suite après commence la remise en cause de tous les acquis de la Seconde république, on remet aux voix tous ce qui avait été gagné, on dissout la commission du Luxembourg qui réfléchissait à l’organisation du travail, on dissout les ateliers nationaux et on somme les ouvriers des ateliers de s’engager dans l’armée ou de quitter Paris, ce qui déclanche les journées de juin. Et les journées de juin elles sont désespérées. Ce ne sont pas des barricades avec des mots d’ordre, avec des vraies revendications. Les comptes-rendus sont sinistres. Les ouvriers qui défilent scandent une litanie lugubre, sourde, « Du pain et du plomb » et les journaux disent que c’est une vraie tragédie. Et vient la répression. Et on est étonné du nombre de morts, plus de quatre mille morts ! Et il y a des quartiers de Paris quasiment rasés ! C’est terrible. Il y a toute une stratégie pour faire table rase, le pouvoir fait monter la pression. L’armée est stationnée autour de Paris et à un moment donnée l’armée envahie Paris. Ce n’est pas aussi violent que la Commune, mais presque. Et hélas c’est oublié. Lorsque je préparais ce travail je parlais de ça à mes amis… Les gens ont du mal à situer à quel moment ça se passe. Heureusement que ces grands noms Barbès, Blanqui, ont leurs avenues… Mais cette Seconde République a été tellement courte… Et pourtant les idées nous portent jusqu’à aujourd’hui. Mais les gens ont du mal à situer alors que la Commune est beaucoup plus ancrée. En fait ces événements et la Seconde République progressiste durent de Février à Juillet 1848. Après juillet, c’est le basculement et les idées de 48 sont alors derrière. (...)
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