Village d'Oc/ Mots d'Oc.- Et cette semaine nous poursuivons notre itinéraire découverte de la Double, cette vaste forêt ponctuée d'étangs à l'ouest du département de la Dordogne. Après Echourgnac la semaine dernière, nous arrivons à La Jemaye. Le village est humble, comme beaucoup de bourgs dans la forêt qui sont souvent discrètement construits dans une clairière. Au cœur du village deux éléments patrimoniaux sont remarquables. D'abord l'église vouée à la vénération de Saint-Vivien.
C'est une église romane du XIIe siècle en bel appareillage de calcaire très blanc, remaniée au XIXe.
En contre-bas de la grande route la halle couverte est un magnifique édifice, elle est appuyée sur trois nefs de piliers en bois.
Halle des marchés jadis bien sûr, halle des foires, mais aussi des fêtes et même des réunions publiques. A proximité, un petit édifice joliment restauré, en pierre et à toiture de tuile intrigue. C'est l'ancien puits public du village.
La forêt a été le refuge et la base de nombreux camps de maquisards pendant l’Occupation. Ce fut aussi le prétexte à la répression allemande, notamment à la fin de la guerre. C’est ainsi qu'au début de l'été 1944 un détachement de la Division Brehmer mène une action répressive sur la commune, tue plusieurs résistants et incendie des fermes notamment au hameau de Baume.
C'est sur la commune que se situe le grand étang de la Jemaye. Ce grand étang (31 ha) s'inscrit dans un chapelet d'étangs enserrés dans la forêt, dans des taillis souvent inégaux, les « jarouilles », ponctués de clairières de brande. Baignade, pêche, pique-nique, canotage, sont autant d'activités proposées à la belle saison. C'est un milieu naturel riche pour la flore et la faune inféodées aux étangs. Ainsi avec la cistude, une tortue d'eau douce qui a fait des étangs de la Double un de ses milieux privilégiés. Dans ce paysage beaucoup de bois, peu de pierres. Certes il y a bien le « grisou », agglomérat de sable et d'argile d'un blanc cassé, mauvaise pierre à bâtir. Ici c'est le pays des « couverts » qui contraste avec le pays des « plainiers », celui de la plaine vers l'Isle ou la Dordogne .
Sur la commune de La Jemaye, de nombreux lieux-dits ont des racines occitanes. Ainsi Beaume (variante dialectale de Baumo pour grotte, caverne), Chapdeuil (de l'occitan capdolh pour maison forte, maison du chef, par extension maison de maître), Les Jarthes ( de l'occitan périgourdin jartar pour essarter, défricher), Les Peyrières (du languedocien peirièro pour carrière ou pierrier). Quant au lieu-dit Le Bois Henry, il renvoie par allusion à un séjour de Henri IV dans cette contrée en 1587.
Le toponyme La Jemaye renverrait au patronyme Jaumard, ce serait donc le domaine de Jaumard. Dans sa forme occitane il s'écrit LA JAMÀIA et se prononce lodzo'mayo'.
* Cette chronique est un rendez-vous hebdomadaire de RVB (Radio Vallée Bergerac) diffusé sur 96,3 MHZ à Bergerac et alentours durant la saison 2017-2018.