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Periberry

Ethnologie, Berry, Périgord, Auvergne, Bergerac, Dordogne, Loire, tradition orale, mémoire paysanne, recherche sur le paysage, randonnées pédestres en Auvergne et Pyrénées, contes et légendes, Histoire.


Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin

Publié par Bernard Stéphan sur 8 Novembre 2024, 11:30am

Catégories : #Histoire, mémoire vivante

Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin

A comme aumônier.- L'abbé Bourdoux, curé d'Aubazine (Corrèze), aumônier militaire, écrit à sa famille en Corrèze le 1er février 1915: "Il n'y a rien d'exagéré dans ce que les journaux racontent des atrocités allemandes."

A comme américains.- L'American Expeditionary Force est constitué le 3 mai 1917. Le 28 juillet 1917 les premier soldats américains, de la 1ere division, défilent à Vierzon dans le Berry.

A comme aviation.- C'est à Aulnat près de Clermont-Ferrand que fut créée pour les besoins de l'aviation militaire naissante, la première piste d'aviation en dur. Courant 1915 les usines Michelin de Clermont produisirent des avions Bréguet, premiers aéroplanes à usage militaire. Il était nécessaire d''aménager un terrain d'entraînement. Très rapidement il s'avéra que la prairie habituellement utilisée était dangereuse en cas de pluie et de terrain détrempé. C'est la manufacture Michelin qui décida de créer la piste en dur, en ciment, ce fut croit-on la première au monde.

Plus au nord, dans le Berry, le camp d'Avord devient un aérodrome et va rapidement se transformer en  première école de pilotage pour cette arme naissante. En août 1914 l'armée française qui alors ne croit guère à ce nouvel outil sur les champs de batailles, aligne seulement 132 aéroplanes. En 1915 l'école d 'Avord délivre 385 brevets de pilotage.  En 1918, à la veille de l'armistice, l'école de pilotage d'Avord accueille mille élèves, 170 instructeurs, 2.560 mécaniciens.

A comme aviation (bis).- C'est près d'Issoudun en Berry que s'installe en à partir du 28 juillet 1917 les hommes du 29th Provisional Aero Squadron pour construite le plus grand camp américain de pilotage aérien, sur une zone de 13.000 hectares. Y seront formés 2.094 pilotes entre le 15 octobre 1917 et début 1919. Cette école installée dans le plat pays de la Champagne berrichonne a entraîné plusieurs as des as américains dont Eddie Rickenbacker, Frank Kuke, Raoul Lufbery ou Quentin Roosevelt (le fils du Président Roosevelt).

 

B comme bal.- Il s'agit bien sûr des bals publics, loisirs essentiels de la jeunesse d'alors. Le 28 avril 1917 le préfet de la Haute-Vienne (Limousin) prend un arrêté qui est affiché à la porte de toutes les mairies, les bals publics et tous les divertissements bruyants sont interdits. Cet ordre valait non seulement pour les salles publiques mais aussi pour les salles privées, en général les granges des fermes où s'organisaient les bals de villages ou de hameaux.

B comme baptême des canons.- La scène se passait en Auvergne à Aubière où stationnait en 1917 un détachement du corps expéditionnaire américain. Courant juillet une partie du détachement doit monter au front sur l'Argonne. Alors on assiste à une bien étrange cérémonie. Les canons vont être baptisés des patronymes des filles d'Aubière rencontrées par les soldats américains. C'est ainsi que les pièces d'artillerie vont s'appeler  Plancre, Cassière, Bayle, Bouchet, Noellet, Gidon, Bernard, Aubeny, etc. Et une des batteries reçoit simplement le nom de la commune Aubière.

B comme battage.- La scène se passe en Périgord en août 1917. Nous sommes dans une borie du Périgord, ces petites fermes des pechs du Périgord noir près du bourg du Bugue. Justin Descombes, du 108è R.I., est en permission, il est rentrée pour les battages. Selon le mot local on va "dépiquer" avec la batteuse entraînée par la locomobile à vapeur. La scène rapporté par Justin Descombes lui-même évoque un battage qui a perdu les joies d'antan. " (...) on n'entend pas ces éclats de rire ou ces cris enjoués des années passées. Nombre de femmes sont là,  à faire passer des gerbes sur la plate-forme de la batteuse ou à manier la fourche pour entasser la paille à la place de leur mari absent. Des gamins ou des vieillards que l'on ne voyait pas sur ce type de chantier tiennent la place occupée auparavant par des hommes vigoureux."

B comme Belges.- Raconté par la briviste Marguerite Genès dans ses carnets à la date du 3 juillet 1915 à propos d'un conférencier et écrivain Belge, réfugié à Brive, qui raconte son exode: " Conférence de l’écrivain belge C. Demblon qui nous raconte sa fuite à travers les villes et les villages flamands, et [les] vallons en flammes et en ruines où restent 1 500 habitants sur 25 000, ou 15 sur 2 000, et où s’accomplirent les crimes, les massacres les plus révoltants. Dernier commentaire, involontaire et poignant des souffrances endurées par les Belges : le conférencier, pris d’un accès de toux, porte à sa bouche son mouchoir qui se tache de sang…"

B comme blé de printemps.- En 1918 beaucoup de cultivateurs du Périgord sèment du blé de printemps. Le pays manquant de farine, les autorités incitent à cette production. Une céréales tellement importante qu'il sera rigoureusement interdit d'en donner en provende aux animaux. Une chronique du bourg du Bugue signale que la qualité du pain se dégrade à mesure que dure la guerre. Début 1918 on fabrique le pain, au Bugue avec un mélange de farines de froment, maïs, orge, seigle, féveroles.

B comme blessés.- Les hôpitaux de l'arrière ont été à l'origine de la première confrontation entre les habitants du lointain arrière et la réalité du front. Ainsi dans le département de la Corrèze où les premiers convois de blessés arrivent le 27 août 1914 à Tulle et le 30 août à Brive. Au début de la guerre ces hôpitaux temporaires vont, outre les personnels de santé, faire appel à des bénévoles dont beaucoup de femmes. C'est en septembre 1914, à la suite de la retraite d'août et de la bataille de la Marne que les hôpitaux temporaires de la Corrèze vont accueillir quotidiennement le plus de blessés. A Brive, l'hôpital de la Croix Rouge et celui de la Caserne Brune accueillent alors 96 blessés par jour. Le paysage des hôpitaux temporaires est alors très important. Le seul département de la Corrèze est alors équipé de quarante établissements sanitaires pour une capacité de trois mille lits. Il y aura même la création, à Beaulieu-sur-Dordogne, en 1918, d'un hôpital militaire américain, "l'US camp hospital".

B comme blessés.- Relevé dans les carnets de la briviste Marguerite Genès qui a ainsi chroniqué les années de guerre. Cette note datée du 29 septembre 1915 à propos des blessés qui arrivent en Corrèze à Brive: "Hélas ! des blessés, des blessés, encore des blessés ! Les hôpitaux sont pleins ; le collège, la caserne vont redevenir hôpitaux. On croise sans cesse des autos où gisent des soldats portant des pansements de toutes sortes. L’un d’eux, un compatriote aux bras et aux jambes emmaillotés, soulève sa tête et les yeux brillants crie : « Ai beleu perdut lous hatz mais las chambas, [ieras ?] sui counteu ! » Les obus lacrymogènes, dernière invention des Teutons, ont fait beaucoup d’aveugles. On chuchote en ville que tel et tel ont disparu, sont morts. La joie du succès est tout endeuillée. Je crains aussi que nous n’ayons remporté qu’une victoire stérile."

B comme boucherie.- En mars 1915 les cours de la viande bovine explosent. A cela deux raisons. D'abord l'augmentation de la ration de viande quotidienne du soldat et d'autre part la chute des effectifs des animaux gras en raison même des effets des réquisitions des bêtes de trait et des bêtes pour la récupération du cuir. Ce qui va conduire a abattre des animaux de plus en plus jeunes à mesure que les années de guerre passent. La réglementation en vigueur avant la guerre précisant qu'on ne doit pas abattre de bêtes trop jeunes, de bêtes inscrites au livre généalogiques, de vaches laitières pleines, et que l'on doit privilégier les viandes ovines, caprines et porcines, n'est rapidement plus respectée au risque de même en péril l'avenir des cheptels bovins.

B comme boulanger.- C’est début 1917 que les pénuries de farine s’accentue après l'année 1916 qui aura été une très mauvaise année de récoltes de céréales. Avec en particulier l’instauration de la carte de pain en 1917 qui oblige, en particulier, les boulangers a produire uniquement des gros pains qui ne peuvent être vendus que douze heures après la cuisson. Ce pain ainsi légèrement rassit est supposé susciter moins d’appétence chez les consommateurs et ainsi durer plus longtemps. Le rationnement s'appuie sur la division de la population en  six catégories: E les enfants, A les adultes, J les jeunes, T les travailleurs, C les cultivateurs, V les vieillards. Les militaires au front sont une catégorie  à part. Une septième catégorie sera établie avec les militaires en permission.

B comme Brabant.- Le lendemain de la guerre va coïncider avec une modernisation de l'outillage des labours en Corrèze et en Périgord. C'est ainsi que la vieille araire va être progressivement remplacée par le brabant double, un soc réservible qui laboure plus profond et qui se manie avec moins de peine que la vieille araire.

C comme Chaleil.- Le chaleil ou caleil est, dans le Périgord, une simple lampe à huile. C’est probablement la forme d’éclairage rustique le plus archaïque qui soit. On trouve dans l’Égypte ancienne des lampes en terre cuite qui ont la forme des caleils. Ils ont peu changé au cours des temps,  seule concession à l’évolution, ils sont en cuivre. Ces chaleils vont être remis en service en Périgord à la suite de la pénurie d’énergie, pénurie de pétrole lampant et pénurie de charbon.  C’est ainsi que dans les principales villes du département de la Dordogne les rues ne seront plus éclairées, le charbon alimentant les centrales électriques étant économisés pour d’autres usages et  notamment celui des chemins de fer. On retrouve des témoignages dans les lettres de guerre des poilus du Périgord selon lesquels, dans les fermes du Périgord noir, on remet en service les chaleils qu’on alimente souvent avec de l’huile de noix  produite dans l’autarcie des fermes ou avec du gras de suif animal. En décembre 1917 en Dordogne, l’évêque donne pour consigne à ses prêtres de paroisses d’annuler les messes de minuit pour économiser l’énergie.

C comme chaleur.- Évoquant le climat de ce mois d'août 1914, l'écrivain Christian Mallet, combattant près de Sedan, évoque le soleil "équatorial", la poussière permanente et la présence de "nuées de mouches et de taons".

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C comme chevaux.- Ils ont été mis à l'honneur dans le film Cheval de guerre. L'armée était une armée des hommes et des chevaux. Les chevaux avaient un numéro et un fascicule de mobilisation. Le premier jour de la guerre les chevaux devaient être rassemblés et conduits vers les centres de mobilisation. " En ces journées des 2, 3 et 4 août les routes de France furent envahies par de longues files de chevaux  et d'hommes pour les conduire, un homme pour deux ou trois chevaux. Les campagnes se vidaient de leur force vitale et la guerre qui était déclarée allait être la guerre des hommes et des chevaux", écrit Christian Connet dans son livre An 14, le tocsin en plein moisson (1998).

C comme chiffres.- En 1918 quand sonne la fin de la guerre, on dénombre chez les paysans 700.000 morts et environ 500.000 mutilés et blessés. 1/4 des actifs agricoles sont morts ou sont invalides.

C comme chômeurs.- Dans Le Populaire (journal de la Haute-Vienne) du 3 août 1914 le préfet s'adresse aux maires des communes pour leur demander de lui faire connaître d'extrême urgence s'ils disposent de la main d'oeuvre suffisante pour terminer les moissons. Dans la négative les maires sont priés de préciser de combien d'hommes et de femmes ils ont besoin. Le préfet indique qu'il pourra réquisitionner des chômeurs pour les envoyer dans les fermes en attente de bras.

D comme démembrement.- Il s'agit des grands domaines divisées en métairies. En Périgord, dans une partie de la vallée de la Dordogne le démembrement avait débuté après la crise du phylloxéra responsable de la disparition d'une partie du vignoble. Les grands propriétaires fonciers de la vallée avaient le choix entre replanter des hybrides ou vendre les métairies. Ce mouvement de démembrement fut relancé fortement au lendemain de 1918 avec le constat de la mort au front de nombreux métayers. Faute de bras de nombreuses métairies ont été vendues. Dernière raison de ces ventes de terres, la chute de la rente foncière qui est significative dans les années d'après-guerre.

D comme démographie rurale.- Quand arrive l'année 1914 la France est majoritairement rurale. 60% de la population vit alors à la campagne et 8 millions de français sont employés dans l'agriculture, ce qui représente près de 40% de la population active. L'agriculture produit alors 40% de la richesse nationale. Cette démographie paysanne est alors très inégalitaire. D'abord si on considère la situation du foncier. En 1914 55% des exploitations agricoles sont très petites, entre un et cinq hectares ! Autant dire qu'elles ne suffisent pas à nourrir des familles souvent nombreuses, les bras doivent aller se louer ailleurs. A l'opposé 4% seulement des propriétaires possèdent les très grands domaines et rassemblent à eux seuls un peu plus de 40% des surfaces du pays ! Ce sont ces propriétaires qui vivent richement alors de la rente foncière. Ils constituent le gros de la troupe des 560.000 propriétaires-rentiers de ces années d'avant-guerre. Ils emploient largement les masses laborieuses issues des familles nombreuses qui vivent dans la vaste mozaïque de la très petite exploitation agricole. Les grands domaines emploient en 1914 un peu plus de trois millions de journaliers, domestiques, filles de maison, vachers, laboureurs et bergers.

D comme deuxième année.- La deuxième année de la guerre a vu les productions rurales s’effondrer en raison notamment de l’incorporation des jeunes hommes des classes 16 et 17 et de quelques hommes du service auxiliaire. On ne trouvait plus de journaliers et domestiques des fermes et domaine. Il faut bien penser qu’en 1915 le travail des fermes est en partie fondée sur la domesticité journalière et sur les louées saisonnières (voir ce mot). Les bras de ces hommes  n’étaient plus disponibles, tous les jeunes gens valides étant mobilisés. 

D comme Douaumont.- Le 321è RI de Montluçon (Allier) a été le premier, via un de ses détachements, à pénétrer dans le fort de Douaumont, sur le champ de bataille de Verdun, pour le libérer, le 24 octobre 1916.

E comme endimanché.- Les mobilisés des campagne sont arrivés souvent avec leurs plus beaux atours. En Corrèze, à Tulle, l'historienne Jeanne Ribeyrie raconte ainsi: "(...) on  a vu arriver des hommes avec canotier et habit du dimanche."

F comme fausse nouvelle.- Août 1914 a été propice aux rumeurs et aux fausses nouvelles. Parmi ces fausses nouvelles il y a celle de bonbons empoisonnés qui court dans le sud-ouest de la France. Et en Corrèze il y a la rumeur des soldats allemands habillés en femmes qui auraient été apperçus dans la campagne. Et que personne n'a  jamais vu concrètement. 

F comme femmes.- Le 6 août 1914 René Viviani, président du Conseil, élu du département de la Creuse, mobilise les femmes agricultrices. Il fait afficher dans toutes les mairies et les lieux publics un placard portant un appel à l’attention des trois millions de paysannes. Il leur demande de prendre la relève dans les fermes, de terminer les récoltes de l’année, de préparer les semailles d’automne et d’assurer la conduite des familles. 1/3 des exploitations agricols vont avoir à leur tête des femmes. On lit notamment dans la proclamation affichée sur les murs de France: "Debout donc, Femmes françaises, jeunes enfants filles et fils de la Patrie ! Remplacez sur le champ du travail ceux qui sont sur les champs de bataille. Préparez-vous à leur montrer demain la terre cultivée, les récoltes rentrées, les champs ensemencés ! (...)" Ce document est connu sous le nom "d'appel de Viviani".

F comme femmes (bis).- C'est l'exemple des usines à la campagne et de la prolétarisation des femmes paysannes qui sont appelées dans les ateliers pour remplacer les hommes partis au front. L'exemple est celui des forges de Fouchambault (Nièvre) où il y a quatre usines qui tournent à plein. En juin 1917 il y a 420 femmes qui travaillent dans les usines de Fourchambault. D'où la création d'une section des femmes au sein du syndicat des ouvriers métallurgistes de Fourchambault. Cette syndicalisation féminine va aboutir à la première grève des femmes pour réclamer une augmentation de salaires, c'est le 19 juillet 1917. Soixante femmes participent au mouvement. 

F comme femmes (ter).- Etonnant monument aux morts de Moulins-sur-Yèvre (Cher) dans le Berry. Y figure, parmi la liste des noms, celui d'une femme, Marguerite Gautron. C'est un des rares monuments aux morts qui en France porte ainsi le nom d'une femme. Marguerite Gautron avait perdu la vie en travaillant sur le site de Bourges de la Pyrotechnie, à la suite de l'explosion d'une grenade, le 14 mai 1917. Elle avait 22 ans. Elle était une des nombreuses femmes employées dans les industries d'armement pour suppléer l'absence des hommes partis au front.

F comme Forêts.- Plusieurs forêts dont celle de Tronçais (Bourbonnais) ont été exploitées entre 1915 et 1918 pour fournir le bois nécessaire à l'aménagement des tranchées (rondin, palplanches, piquets, caillebotis, fagots, fascines, etc.). C'est le service du Génie qui avait la charge d'organiser les cantonnements militaires forestiers d'exploitation des parcelles au bénéfice de la fourniture des besoins du front. Courant 1918 des cantonnements militaires forestiers de l'armée américaines ont exploité des parcelles de la vaste forêt de Tronçais. Le sujet a été exposé par le Général Georges Chevalier (1854-1938), directeur du Génie dans un livre publié au PUF en 1928 et intitulé Le bois d'oeuvre pendant la guerre.

Ce bouquin est introuvable. Merci à tout lecteur qui peut m'indiquer un exemplaire ou des éléments copiés.

Par ailleurs les américains eux-mêmes ont installé des camps forestiers pour exploiter directement et produire leurs rondins, piquets, planches, poteaux et traverses. Ainsi une scierie-camp  a été ouverte dans le Cantal, à Albepierre-Bredons, avec deux cents hommes  pour exploiter  les bois du "Creux en forêt". De même un camp similaire est ouvert en forêt de Tronçais (Allier), à Couleuvre, pour exploiter le secteur de Bougimont* avec un cantonnement de 323 hommes.

 

F comme Foire.- Dans les carnets de la briviste Marguerite Genès qui, à la date du 10 juin 1915, brosse un rapide et triste du tableau des foires sur la place de La Guierle à Brive:"Approche des foires franches. Dans la Guierle, à peine quatre ou cinq pauvres petites barraques. Le patron de l’une d’elles se promène autour de ses toiles déteintes en répétant obstinément : « Cochon ! Saligaud ! Vache ! » Le petit Dédé, qui m’escorte, demande à demi effrayé : « Qu’è qu’il a ? » Et son camarade Riri de répondre : « I pense à Guillaume !"

 

Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, LimousinLe dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin
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G comme glanage.- La pratique du glanage était pratique courante avant guerre. Si elle était évidente avec la collecte des châtaignes dans les pays de taillis, du bois mort dans les forêts domaniales, des champignons, cette pratique prenait aussi d'autres formes comme le ramassage des pommes ou des pommes-de-terre après des récoltes, des épis de blé restant après les moissons, etc. Le glanage, en particulier aux abords des villes, dans la Limagne en Auvergne, dans la Champagne Berrichonne près de Bourges, d'Issoudun et de Châteauroux, trouve un vrai regain de succés pendant les années de guerre en raison même des pénuries, de la cherté des produits et de la nécessaire débrouille des plus pauvres qui sont les plus nombreux.

G comme Guillaume.- C'est le journal Le Populaire du Centre (22 septembre 1915) qui évoque une séance du Conseil de Guerre de la XIIè région militaire qui a vu comparaître "une ménagère" de la commune de Carlux en Dordogne. Celle-ci avait crié "Vive Guillaume II !" en public. Elle écope de quinze jours de prison ! 

G comme Guynemer.- Georges Guynemer est probablement l'élève le plus célèbre de l'école de pilotage d'Avord (Cher). Il y arrive le 21 mars 1915 et il y suit une formation jusqu'au 8 mai. Le 8 juin il est affecté à l'escadrille n°3, dite des Cigognes, à Vauciennes et remporte le mois suivant son  premier combat aérien. Il aura été un as de l'aviation de combat et trouvera lui-même la mort, le 11 septembre 1917, au-dessus de Poelcapelle en Belgique.

H comme hôpital.- Il s'agit en l'espèce des hôpitaux de l'arrière dits hôpitaux auxiliaires. Un exemple parmi beaucoup d'autres fut celui d'Aubazine en Corrèze. Il fut ouvert le 18 septembre 1914 dans les locaux du couvent-orphelinat et dénommé Hôpital auxiliaire n°13 d'Aubazine. Pendant toute la durée de la guerre cet hôpital d'une capacité de 55 lits recevait les blessés qui arrivaient du front en train, à la gare de Saint-Hilaire, où les infirmières religieuses allaient les chercher en voiture à cheval. Plusieurs habitants du village d'Aubazine ont participé à une action de solidarité envers les blessés pendant les quatre années de la guerre. Il reçut 704 blessés. L'hôpital d'Aubazine a fermé ses portes le 23 décembre 1918. Parmi les très nombreux exemples on peut citer en Creuse à Evaux-les-Bains le couvent du Verbe Incarné, 110 lits, ouvert du 15 septembre 1914 au 10 mars 1919, en Dordogne à Beaumont-du-Périgord l'ancien couvent et écoles primaires avec 102 lits qui reçut 1135 blessés et malades entre le 16 septembre 1914 et le 23 décembre 1918, à Lalinde (Dordogne) le couvent-ouvroir Sainte-Marthe, 35 lits, fonctionna du 13 septembre 1914 au 31 décembre 1915. En Haute-Vienne, à Eymoutiers, la manufacture de lingerie équipée de 100 lits reçut 363 blessés et malades entre le 23 septembre 1914 et le 25 novembre 1916.  (Un lecteur du Limousin me signale que les recherches sur les hôpitaux temporaires de l'arrière offrent beaucoup d'éléments d'archives dans la série R).

I comme informations.- L'information circule lentement pendant la guerre. Rien de nouveau sous le soleil. Avant-guerre l'info circulait mal dans les provinces françaises en raison même de la lenteur des moyens de communication, malgré un réseau ferroviaire très dense. En pleine guerre c'est la presse qui se plaint de cette situation. Exemple avec cet entrefilet publié dans le journal Le Corrézien, à Tulle, le 9 août 1914: "Tulle est renseigné sur les événements 12 ou 24 heures après le reste du pays... C'est à se demander si Tulle et la Corrèze sont en France ?"

J comme Joie.- On a beaucoup écrit sur les cris de joie lorsque l'annonce de la guerre a été connue. Cette version est particulièrement contestée par la recherche historique récente. En revanche ces témoignages  existent. C'est ainsi qu'un carnet journalier tenue par l'institutrice de Verrières, dans le département du Puy-de-Dôme, Madame Matraud, fait part d'une certaine joie des mobilisés du 2 août 1914: « Ils pensent que la guerre ne sera pas de longue durée. On entend des cris : ” Vive la guerre – A Berlin ! ” Les familles des mobilisés se lamentent et maudissent Guillaume », écrit Mme Matraud. 

J comme journaliers ou cri des journaliers.- L’épisode est raconté par l’écrivain Auvergnat Henri Pourrat dans son roman Vent de Mars lorsqu’il évoque la montée en ligne des hommes du 92è R.I. de Clermont-Ferrand : « (…) Et là, on dit qu’en combattant, tout le jour dans les taillis, dans la neige, les hommes du régiment de Clermont se lançaient les uns aux autres le vieux cri des journaliers d’Auvergne : Lacheins pas ! C’était le cri des matins de moissons ou de vendanges, lorsque les propriétaires venaient chercher leur main-d’œuvre sur la place où se faisait la louée. On discutait avec eux du prix de la journée. Et les journaliers se faisaient souvenir, d’un bout de la place à l’autre, de tenir le prix convenu, sans lâcher d’un seul liard. Lacheins pas ! Lâchons pas ! Le mot est bon ; il ne veut dire la chose qu’en riant, avec une paisible horreur pour l’emphase et la fanfare, mais il sait bien la dire. »

J comme juments.- Dès la mobilisation la loi de réquisition s'applique et notamment sur les chevaux. (Lire sur ce blog l'article consacré à la réquisition). L'exemption de la réquisition pour les juments pleines permettra de conserver la base du cheptel. On va d'ailleurs observer dans certaines régions une augmentation importante du nombre de saillies dès le début de la guerre pour éviter la réquisition des juments.

L comme labours. Ils sont évoqués dans une lettre du 15 mars 1915 adressée depuis une ferme de la commune des Ancizes (Puy-de -Dôme) par la famille D. à leur fils qui est dans les tranchées. « Ici, il fait ces jours-ci un beau temps superbe. Si ça continue, nous ne serons pas sans travail, nous allons commencer à labourer pour le blé de printemps et pour les autres semailles que si le temps le permet. Enfin, nous ferons notre possible pour faire le principal ; le reste attendra plus tard. »

L comme laboureur.- C'est un bas relief qui représente un soldat laboureur. L'homme penché sur l'araire est coiffé du casque des fantassins français. Cette misre en scène illustre le monument aux morts de Saint-Priest-Ligoure (Haute-Vienne). Illustration parfaire du paysan-soldat s'il en est. 

L comme laine.- La production de laine domestique va être très encadrée pendant la guerre en raison notamment des besoins de laine pour fabriquer les effets militaires (vêtements ou couvertures). Un exemple est évoqué dans les carnets du poilu Justin Descombes, dont la famille, travaille sur une petite ferme du Périgord Noir près de Le Bugue, un bourg sur la rive de la Vézère. En 1917 seule la laine pour un strict usage familial peut être conservée dans les fermes, le surplus (l'essentiel), doit être mis à disposition de la commission d'achat pour les besoins des ateliers militaires. 

L comme statue de la Liberté.- Ils sont probablement très rares les monuments aux morts qui sont illustrés d'une réplique de la statue de la liberté de Bartholdi qui accueille les visiteurs au droit de New-York le regard tourné vers la vieille Europe. il faut en chercher la réplique en Limousin, à Châteauneuf-la-Forêt. La fameuse liberté éclairant le mondesurplombe le monument aux mort de ce bourg. Ce monument fut édifié en 1924.  

L comme Limousin.-  Cette région est cité par un jeune appelé de Douelle (Lot) qui fit ses classes au 7è RI de Cahors en septembre 1914. Il fut appelé au front début 1915; il a décrit ainsi son voyage à travers la France, cinquante heure dans des wagons à bestiaux,  pour aller vers le nord et rejoindre le camp de Suippes (Marne): "J'ai vu le Limousin avec ses bois, ses prés, ses grandes fougères, la Beauce avec sa belle plaine et ses grands champs de blé, enfin la Champagne où fourmillent ses nombreuses usines."

M comme météo.- Le temps de cet été 1914 n'est pas très estival. Dans son journal, l'écrivain Pierre Loti qui est encore en Charente dans sa maison de Rochefort, écrit à la date du lundi 27 juillet: " Toujours des temps sombres et glacés, on est habillé comme en décembre." Et à la date du 1er août: "Temps accablant d'orage, sous un ciel noir."

M comme machinisme.- Au centre de la France, à Vierzon, les usines de fabrication de machines agricoles sont un élément majeur de l'activité économique locale avant guerre. Avec le conflit, plusieurs de ces manufactures vont être réquisitionnées et transformées pour produire de l'armement et notamment des munitions pour l'artillerie.

M comme Maison Close.- Lorsque les américains débarquent en France en 1917 ils apportent toute leur logistique et toute leur manière de vivre. Plusieurs structures importantes s'installent dans le Berry à proximité d'Issoudun. Et si l'armée américaine fit les beaux jours des cafés d'Issoudun, c'est dans cette petite ville que fut créée la première maison de tolérance de la cité baptisée "Les Petites Botttines".  Et comme il s'agissait d'une maison pour soutenir le moral des troupes dans le lointain arrière et aussi à l'initiative des américains venus prêter main forte, il fallait bien une inauguration officielle. Pour l'occasion c'est le sous-préfet d'Issoudun lui-même, un certain Angelo Chiappe, qui coupa le ruban et eut cette expression qui dit-on n'est pas apocryphe: "Je déclare cette maison close ouverte !"

M comme mildiou.- Cette maladie phytosanitaire affecte particulièrement la vigne.  Elle est très présente en 1915, et elle compromet la qualité des vendanges de cette seconde année de guerre. Le mildiou trouve une matière propice à se développer en année humide ce qui a été le cas au printemps et durant l’été 1915. Cette pénurie annoncée de vins de soif préoccupe l’État Major qui a demandé que les poilus reçoivent au quotidien une dose significative de vin. Ces mauvaises conditions météo qui vont affecter les récoltes de vin dans la plupart des régions viticoles en cette année 1915 auront aussi le même effet catastrophique sur la récole d’olives dans le Midi.

M comme million. 4 millions c’est à peu près le nombre de paysans qui seront mobilisés entre 1914 et 1918. Ils fourniront ainsi l’essentiel de la fameuse « chair à canon ». Seulement 1,5 million d’hommes (trop âgés ou trop jeunes) restent dans les fermes.

M comme moissons.- Cette brève publié dans la rubrique Chambon, département de la Creuse, dans Le Populaire du Centre, quotidien de Limoges, le dimanche 8 août 1915: " Les moissons. Les moissons se font à peu près normalement; à certains endroits le seigle est pourtant défectueux, par contre le froment n'est pas mauvais; le rendement ne sera guère inférieur à celui de l'année précédente."

M comme moissons (bis).- En cet été 1914 le temps est humide, les pluies fréquentes. ce qui explique un retard dans le déroulement normal des moissons. au point que fin juillet  des préfets prennent des arrêtés et les font placarder à la porte des mairies pour donner quelques conseils de préservation de la récolte. ainsi celui-ci, affiché dans le département de la Haute-Vienne, en Limousin, à partir du 30 juillet: "Pour atténuer, dans la mesure du possible, les conséquences redoutables que  peut avoir la persistance des pluies en ce  qui concerne la moisson, nous croyons utile de rappeler aux cultivateurs l'utilité que  présente actuellement la mise en moyettes de leurs céréales coupées ou qui restent à  couper. Il y aurait lieu, de profiter des  heures d'éclaircie pour y procéder de la  façon suivante :  une gerbe bien plantée, verticalement,  les épis en haut. Quatre autres gerbes disposées autour, la soutenant et le pied légèrement écarté pour faciliter l'aération  des pailles. Et,, enfin, une sixième gerbe,  liée un peu bas, renversée sur les premières, après avoir écarté les pailles au-dessus  du lien, et formant chapeau pour abriter,  les épis des cinq autres gerbes. (...) Sans remplacer le soleil, ce moyen relativement facile, laissera aux pailles et aux  herbes le temps de sécher tout en préservant les grains de l'altération qui se produit vite quand, en année pluvieuse, ils  restent longtemps couchés sur la terre." Cette moisson tardive en raison du mauvais temps est assez générale en France. On a des témoignages sur la récolte retardée en Beauce, en raison des pluies d'été. Et à l'évidence après le 2 août 1914 la poursuite de la moisson va être particulièrement difficile. Car ce sont 3,7 millions de jeunes hommes paysans qui sont mobilisés sur 5,2 millions d'hommes valides à la terre à ce moment-là. C'est aussi la raison pour laquelle tous les témoignages de la journée du 1er août indiquent que le tocsin qui sonne en fin d'après-midi saisit les campagnes en pleines moissons.

M comme moissons (ter).- La scène se passe en Beauce.  Dans la commune de Coulmiers où se réunit, le 9 août 1914 à une heure de l'après-midi, le conseil municipal. Il s'agit de prendre des mesures de solidarité consécutive au départ des hommes valides et à l'attente des moissons. Celles-ci étaient très en retard ne raison d'une part du mauvais temps estival (orages et pluies) et du départ des hommes pour la guerre. Le conseil municipal décida que tout agriculteur, propriétaire d'une machine moissonneuse-lieuse, qui aurait fini sa fauche et sa mise des javelles en gerbes serait mis en demeure de prêter sa machine et ses bêtes de trait pour faire la moisson des agriculteurs voisins mobilisés. Les moissons devraient être terminées pour le 14 août.

 

Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin

N comme nouvelles.- Les nouvelles arrivent très lentement dans les campagnes. Prenons l'exemple de la Corrèze. Là on est loin des grands axes et lorsque le train débarque marchandises dans les gare de la ligne entre Uzerche et Brive il faudra du temps avant que les unes ou les autres gagnent les villages du plateau ou du causse ou les collines de la haute-Corrèze ou de la Xaintrie. Le 9 août 1914 c'est un journal local, Le Corrézien, qui fait état de cette misère de la communication dans ses colonnes: " Tulle est renseigné sur les événements 12 à 24 heures après le reste du pays... C'est à se demander si Tulle et la Corrèze sont en France ?..."

O comme obsibional.- Voilà un bien étrange mot. C'est un adjectif, qui joint à une plante indique que celle-ci s'est propagée pendant les conflits.  C'est ainsi que durant la Grande Guerre les troupes allemandes dormaient sur des paillasses garnies d'un jonc, le carex brizoïde L. Une herbe tellement bien adaptée à la Lorraine qu'elle s'y est installée. Même destin pour la Bermudienne des montagnes. Une petite plante ayant la forme d'une étoile bleue et jaune. Elle est arrivée en France par les ports de l'ouest, en 1917, dans le fourrage des chevaux américains en provenance du Maryland.

P comme pacifisme: Les préfets vont traquer tout au long de la guerre les mouvements pacifistes, les actions de mobilisation contre la guerre et contre l'enrôlement. Le 10 février 1917 le commissaire de police de Montluçon (Allier) répond par lettre à une circulaire du préfet de l'Allier. Pour lui indiquer qu'après enquête il n'a trouvé aucun signe de pétition pacifiste chez les ouvriers du bassin industriel de Montluçon et Comentry. Il ajoute: "les ouvriers se plaignent de la durée de la guerre, mais en termes modérés".

P comme pain de ménage.-C’est, dès le début de la guerre que les autorités vont faire appel, outre les réquisitions, aux élans de solidarité des populations pour les premiers prisonniers de guerre. Si les villes sont sollicitées pour les vêtements notamment, les campagne sont appelées pour fabriquer du « pain de ménage ». Près du bourg du  Bugue, dans le Périgord, le maires ruraux sont sollicités pour la remise en chauffe des fours familiaux. Georges Labrousse dans son livre Justin Descombes, paysan du Périgord, poilu de 14-18 (éditions Pilote 24), raconte ainsi cet appel : « Les autorités demandent à la population des campagnes de rallumer les fours familiaux et de préparer du pain de ménage qui peut se conserver trois semaines. (…) des conseils sont donnés  pour l’envoi : il faut envelopper le pain, qui doit être bien cuit et assez salé, d’un papier solide. »

P comme peintre.- A redécouvrir les aquarelles de  J.Mario Pérouse (1880-1958), peintre auvergnat dit de l'école de Murol. Il a beaucoup peint les paysages auvergnats, mais aussi les paysages provençaux. Une mention particulière pour sa série de scènes baptisées "Vendanges dans le val d'Allier". Pendant la Grande Guerre il est mobilisé avec le grade de sous-lieutenant au 305è R.I. Il est au front, il participe à la guerre de mouvements et aux longues périodes dans les tranchées. Pendant les jours d'attente ou la vie à l'arrière, il va mettre à profit son talent, pour, avec la technique de l'aquarelle, immortaliser les scènes de la guerre. En juin 1916 il participe à l'attaque du fort de Vaux, où il est gazé. Plusieurs oeuvres de Pérouse sont exposées au musée de l'école de Murol à Murols (Puy-de-Dôme). 

P comme pigeon.- Dès le début de la guerre des brigades colombophiles vont utiliser les services de milliers de pigeons voyageurs.  Ces pigeons vont permettre de faire passer des messages pour franchir les lignes les plus exposées du champ de bataille.

P comme pinard.- C'est le fameux vin des poilus. Ce breuvage qui arrive tout droit des régions de grandes productions, notamment le midi viticole, mais aussi le sud-ouest, les Charentes et l'Auvergne, sera là pour améliorer l'ordinaire. Un quart de vin tous les jours pour soutenir le moral des troupes. Ration qui sera portée à double quart quotidien à partir de 1916 et trois-quart de litre en 1918 ! Cette année-là devant les besoins croissants de la troupe, l'armée met en place la réquisition chez les producteurs. Parmi les vins fournis au front il y a aussi ceux qui arrivent des colonies et notamment d'Afrique du nord avec les productions d'Algérie et du Maroc. Une consommation de masse encouragée, au point que "Le père Pinart" sera une sorte de personnage joyeux qui va inspirer les poètes et les chansonniers. Dès août 1914 les vignerons du Midi dans un geste patriotique offrent 200.000 litres de vins pour le front. D'où vient le mot pinard ? on pense au cépage pinot qui aurait pu ainsi en être la racine.  C'est ne tous les cas un argot des régiments employé avant-guerre et populariser dans les tranchées.

P comme plantation.- Les paysages furent dévastés bouleversés. 178.511 hectares, le long de la ligne de front furent déclarés zone rouge. Au lendemain de la guerre il fallut replanter. Des forêts entières ont été constitués, les paysage des anciens pâturages en ont été profondément modifiés. Des quantités impressionnantes de plants ont été nécessaires. Parmi les fournisseurs, il y a les Pépinières du Massif central, créées en 1921 à Arrènes dans l'ouest du département de la Creuse. Au début des années 1930 la pépinière produisit vingt millions de plants ! Elle reboisa 7000 hectares de la zone rouge. Dans l'hiver 1931-1932 les Pépinières du Massif central plantent 14 millions d'arbres sur la zone rouge.

P comme Polonais.- Mobilisé dans l'armée allemandes de nombreux soldats polonais, prisonniers de guerre, furent internés dans le Massif central à Espaly (Haute-Loire). L'arrivée des premiers prisonniers, le 5 juin 1915, fut mouvementée avec la foule qui invectiva la colonne traversant à pied le bourg. De nombreux prisonniers furent employés dans les mines de la Loire et de l'Allier, dans les fermes et dans les usines locales pour pallier à l'absence des hommes. La dernière année de la guerre, de nombreux polonais furent réengagés pour combattre sur le front aux côtés des alliés, contre l'Allemagne.

P comme poupée.- Réfugié à Limoges, originaire du département du nord, un certain Ducongé, modeleur de faïence, créa dans une manufacture de porcelaine de la ville des poupées articulées en céramique qui vont être des jouets bon marché sur les bazars de la période de la guerre. Selon le journal le Courrier du Centre "la poupée limousine, gracieuse et originale, a remplacé entre les mains des petits enfants la vilaine poupée boche".

P comme prairies.- Dès la réquisition des chevaux et des boeufs dans certaines régions, on va rapidement observer une conjonction de cette absence d'animaux de trait et de la pénurie de main d'oeuvre en raison de la mobilisation. On assiste donc, dès 1915, à une évolution significative de l'occupation des sols agraires avec une réduction des surfaces emblavées et une croissance des surfaces de prairies et de friches.

P comme prénoms.- Une étude des morts pour la France de la commune de Tulle (Corrèze) met en exergue les trois prénoms de la majorité des morts dans le conflit. Ils s'agit des  Jean (92 morts), des Antoine (55 morts) et des Pierre (48 morts).

P comme prisonniers.- Les différences sociales étaient respectées jusque dans le traitement des prisonniers allemands. Ainsi en Haute-Loire, au Puy-en-Velay, les gradés étaient logés avec leurs épouses dans le château de La Roche Arnaud. Les non gradés, hommes de troupes, étaient logés dans un casernement et affectés à des travaux de force, au quotidien, dont l'empierrement des routes. 

P comme Propagande.- Au Puy-en-Velay (Haute-Loire) le liquoriste Auguste Morin pratiquait une communication agressive avec affiches, encarts dans les journaux locaux, cartes postales de réclames. Chacun des supports est alors assorti d'un court texte. Avec la Grande Guerre les fameux textes des réclames prennent un tour très combatif, de soutien à nos soldats et d'appel à la lutte contre le "boche". Ainsi ce texte de février 1914, alors que déjà l'Europe est pleine des bruits de bottes qui s'annoncent: "On entendra chants de conquête / Bientôt sur l'autre bord du Rhin/ Le son guerrier de nos trompettes/ Si nous aimons le vrai Maurin".

R comme récoltes.- Elles seront mauvaises à la fin de l'été 1914. C'est en effet une fin d'été pluvieuse qui surprend les paysans en pleines moissons. Avec le départ des hommes à la guerre, beaucoup de moissons vont être interrompues et retardées. Avec la pluie du début du mois d'août une partie du blé va germer sur pied. Mauvais temps aussi pour les prairies, trop humides pour que puissent être normalement récoltés les regains à la fin de l'été. Mauvais temps pour les vendanges, l'humidité va retarder le mûrissement des raisins, la récolte sera, cette année-là, très tardive.

R comme Réquisitions.- Dans de nombreuses communes c'est le conseil municipal qui crée une commission du ravitaillement qui est envoyée dans les fermes pour dresser l'inventaire des animaux et produits qui devront être fournis pour la prochaine réquisition.On a ainsi l'exemple du conseil municipal de Vaulry (Haute-Vienne) qui, en mai 1916, envoie la commission dans les fermes pour marquer les animaux qui devront être requis pour les besoins des boucheries militaires.

R comme refus de réquisition.- Les faits sont rapporté par le journal Le Populaire du Centre, daté du 27 septembre 1915. Le journal raconte les faits suivants: M. Pelât, adjoint au maire de la commune de Bussière-Poitevine (Haute-Vienne), recevait ces jours derniers de l'autorité militaire l'ordre de réquisitionner certaine quantité d'avoine. Le prix fixé était un peu au-dessous du cours officiel. Pour ne léser personne, M. Pelât s'empressa de remettre une petite quantité de son à plusieurs propriétaires possédant cette avoine. Les charretiers se mirent en train: prendre l'avoine chez les propriétaires. Tous sauf un, mirent de la bonne volonté pour fournir la marchandise demandée sans s'inquiéter de ce qu'ils auraient pu vendre au marché. Mais lorsqu'un charretier se présenta chez M. L. D..., il fut stupéfait de se voir remettre les sac vides. Pour ce monsieur, riche propriétaire, les prix étant insuffisants, il refusa, tout simplement d'obéir à l'ordre de réquisition. Nous osons espérer qu'on n'oubliera pas en haut lieu, que la loi est égale pour tous et qu'on l'appliquera à ce farouche pair.

R comme Rochambeau.-  A Thoré (Loir-et-Cher) dans la commune natale du marquis de Rochambeau, les soldats américains se sont inclinés sur la tombe de l'illustre pour la fête de l'Indépendance Day, le 4 juillet 1918. Rochambeau était compagnon d'arme du marquis de Lafayette et du général Washington pendant la guerre d'Indépendance américaine.

R comme rouge.- Il s'agit bien sûr du pantalon rouge garance. D'où vient-il ? La réponse est donnée dans l'édition du 14 janvier 1915 du journal Le Populaire du Centre, à Limoges. Voici le texte extrait du journal:  " Le roi a décidé, le 26 de ce mois, que le  pantalon de drap garance serait substitué au pantalon bleu, dans l'uniforme de l'infanterie de ligne et de l'infanterie légère. Ce  changement n'aura lieu qu'au fur et à mesure des remplacements. Le ministre la guerre était M. de Cau."

R comme Russie.- J'ai trouvé à Tulle (Corrèze) un mort pour la France le 18 mars... 1919! Il est tué en Russie à Berezowska où la guerre se poursuit alors.

S comme salaires.- Il s’agit du salaire des journaliers et des domestiques dans les fermes et domaines agricoles. En raison  de la pénurie de bras il y a à partir de 1915 une inflation des salaires. C’est ainsi que le salaire d’un journalier est de 8 francs par jour plus la nourriture. Pour un domestique engagé à la louée saisonnière, le salaire d’été est de 150 francs par mois, plus la nourriture et le coucher.

S comme semailles.- Cette brève dans Le Populaire du Centre (de la Haute-Vienne) du jeudi 6 novembre 1914 : 

Permission pour semailles : Comme suite à ses précédentes instructions, M le Ministre de la guerre vient de faire connaître que les permissions pour semailles prévues pour les hommes de dépôts territoriaux  peuvent également être accordées aux agriculteurs actuellement affectés au service des voies ferrées.

S comme plantes sarclées.- Ces plantes qui demandent beaucoup de main d’œuvre vont voir leur production chuter à partir de 1915 en raison du manque  de  bras. Ce sera au profit des céréales (blé et avoine) dont la demande est forte notamment pour le pain de la troupe et pour la nourriture des chevaux des régiments. De même l’élevage qui peut être l’affaire  des femmes, des vieux ou des enfants (pour le gardiennage) qui ne sera pas affecté et va même progresser en nombre de têtes de bétail.

S comme surmortalité.- Ce sont les départements ruraux à faible industrialisation qui affiche la plus forte proportion de tués sur le front de la Grande Guerre.  Ainsi on constate une surmortalité dans les pays des contreforts du Massif central. Ainsi le nombre de morts par rapport au nombre total d'hommes (recensement de 1911) montre un taux très élevé en Corrèze (8,89%), dans le Cantal (8,28%), en Lozère (10,9%), en Creuse (8,11%), en Dordogne (7,64%), en Haute-Vienne (7, 81%), dans l'Indre (7,61%); dans l'Aveyron (8,41%). C'est bien la population paysanne des régions essentiellement rurales qui a  fourni  l'essentiel des combattant de l'infanterie, les plus touchés par les pertes au front.Si on met en adéquation le nombre de morts par département et le taux de population agricole, on observe qu'il y a un calque presque parfait. C'est ainsi que le taux de population agricole dépasse 65% de la population en 1914 dans les départements de la Dordogne, de la Corrèze, de la Creuse, du Cantal, de la Lozère, notamment. Proportionnellement à sa démographie, c'est l'actuelle région du Limousin qui a été le plus touchée par les pertes humaines au front.

T comme tabac.- C'est la guerre qui va assurer la promotion du tabac et l'accroissement du monde de la production, notamment dans le Périgord et l'Agenais.  On va produire des paquets de gris, ce tabac en vrac destiné à rouler des cigarettes mais plus généralement à bourrer les pipes. L'armée va distribuer un sachet de cent grammes de tabac par homme toutes les semaines. 

Tabac comme bureaux de tabac.- Lu dans le journal Le Populaire du Centre (Limoges) daté du 20 janvier 1915 à propos de l'attribution des bureaux de tabac, cet avis: "Un décret décide que les vacances survenues dans les débuts et parts de débits de tabac seront réservées, à concurrence de trois quarts aux veuves et orphelins orphelins classés  des officiers, sous-officiers, soldats, fonctionnaires et employés civils de l'Etat morts  sous les drapeaux pendant la durée de la  guerre actuelle ou décédés soit sous les drapeaux, soit après renvoi dans leurs foyers, dans l’année à compter de la cessation des  hostilités, de blessures reçues ou de maladies contractées pendant la guerre. »

Un autre décret modifie de la manière  suivante te mode de concession des recettes  buralistes:

« Nul ne pourra être nommé aux recettes  buralistes laissées à la disposition du ministre des finances par la loi du 21 mars  1905 sur le recrutement de l'armée s'il n'est  inscrit sur les listes de candidatures établies par la commission.  Les trois quarts des postes vacants seront  attribués comme suit :  seront nommées, par droit de préférence,  en remplacement des receveurs buralistes  mobilisés, morts au cours des hostilités, les  veuves ou les filles célibataires majeures  de ces receveurs, qui auront assuré, pendant leur absence, la gestion de leur emploi.  Seront nommés, par droit de préférence,  aux recettes autres que celtes désignées à  l'alinéa précédent, les officiers, sous-officiers ou soldats réformés par congé n° 1,  pour blessures reçues ou maladies; contractées devant l'ennemi et hors d'état de reprendre leurs occupations antérieures. "

T comme Tocsin.-Il s'agit bien sûr du tocsin du 1er août 1914, date de l'annonce de la mobilisation général et de l'appel des soldats qui doivent se présenter dans leurs unités, le lendemain 2 août. Le tocsin a été en général sonné le 1er août à 4 heures de l'après-midi, mais en raison des difficultés de transporter le télégramme officiel (porté par des gendarmes, souvent à pied ou à cheval) le tocsin sonnera dans certaines communes de montagne que vers 8 ou 9 heures du soir.  Dans les gros bourgs il a été souvent complété par le passage du tambour public lisant une proclamation, voire même par un appel au clairon; Le tocsin aux clochers des villes et villages porte loin et a l'avantage d'alerter les campagnes. Un exemple de ce moment est donné dans le Berry avec les notes du cahier d'Eugène Hubert qui habite alors la commune d'Ardentes, dans le département de l'Indre. Voici comment il rapporte ce moment du tocsin du 1er août 1914: «Samedi, 5 heures du soir. Proclamation de la mobilisation : vicaire d'Ardentes sonnant du clairon ; un des chantres, Aucouturier, en bras de chemise, battant du tambour, suivi d'une troupe de gamins ; le tocsin… Tristesse générale. Groupe de femmes, les yeux mouillés de larmes, grande résignation, grand élan parmi les groupes d'hommes… Idem à Châteauroux. Temps superbe, sur la route d'Ardentes à Châteauroux, les moissons à peine commencées, trois faucheuses mécaniques seulement aperçues sur la route. Vers Clavières, à 5 heures, un conducteur de machine me dit : " On prend mes chevaux après-demain ".

T comme train.- Ce sont les trains de soldats. Ceux qui conduisent les régiments, vers le front durant l'été 1914. Les wagons sont en général décorés, plus ou moins habillés de feuillages,  décorés de caricatures de Guillaumes II ou de soldats portant le casque à pointe et de slogans interpellant "les boches" et prédisant "la victoire en deux coups de cuillère à pot".

T comme train (Bis).- Ce sont les américain s qui vont arriver dans la guerre avec un matériel ferroviaire considérable. Ils débarquent avec pas moins de 30.000 wagons et 3.000 locomotives en pièces détachées, à remonter, pour assurer les transports de toute leur logistiques vers le front.

 

 

Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin
Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin
Le dico de 1914-1918 en Périgord, Auvergne, Berry, Limousin

V comme vendredi.- Le jour de la mobilisation, jour où le Tocsin sonne à toutes les églises de France, est un vendredi.

V comme victimes.- Les campagnes qui sont les premières fournisseuses de soldats, seront aussi les premières endeuillées. Et ce phénomène du deuil massif est très rapide ; en effet les  deux premiers mois de la guerre, août et septembre 1914 avec les grandes batailles, celle des frontières, celle du nord et enfin la grande bataille de la Marne font en deux mois 250.000 morts chez les soldats français ! C’est énorme si on compare à ce que sera la grande bataille de Verdun qui durera un an et qui fera malgré sa tragédie moins de morts que les deux premiers mois côté français !

V comme vin.- Il sera très rapidement considéré comme boisson paysans,guerre,dictionnaireessentielle pour soutenir le moral des troupes. Les autorités vont encourager la production massive de "vins de soif" notamment dans le Midi. Le vin arrivera à proximité du front sans autre conditionnement que les barriques de 220 litres qu'on appelle aussi la bordelaise. Le fameux "quart de vin" fait partie de la distribution quotidienne au poilu. Un commerce du vin s'installe très vite dès le début de la guerre dans les villages de l'arrière des lignes du front. Un poilu cité dans 14-18 vivre et mourir dans les tranchées (Texto Editions) raconte ainsi: "Nous avons continué à marcher encore un instant et nous sommes arrivés dans le village de Courtémont où étaient installés quelques épiciers et marchands de vin et, pendant dix minutes de pause que nous avons obtenues, j'en ai profité pour faire remplir mes deux bidons de pinard."

Le quotidien de Limoges, Le Populaire du Centre, daté du 20 novembre 1914 publie une dépêche qui évoque la mobilisation des vignerons du Midi pour fournir le front. L'exemple pris est celui du départementr de l'Hérault: Sur l'initiative de M. Cause, préfet de  l'Hérault, les représentants des associations agricoles, des syndicats de négociants, les parlementaires et les élus cantonaux se  sont réunis pour l'organisation de l'œuvre du «Vin aux soldats». Au nom du commerce et de la propriété, les délégués ont pris  l'engagement de donner à l'armée gratuitement une quantité de vin sur la base de  un pour cent de la récolte de l'Hérault qui  a produit cette année quatorze millions  d'hectolitres. Ainsi il pourrait être fait don à l'Etat de cent quarante mille hectos. Chaque propriétaire tiendra son quantium à la disposition de l'administration militaire qui se chargera du transport. Les vins donnés à l'armée seront e-xonérés des droits de circulation.

A la fin de 1914 les soldats reçoivent un quart de vin quotidien et rapidement ils vont en recevoir deux. En 1916 c'est le Parlement qui décide d'attribuer un demi-litre gratuit par jour et par soldat. En 1918 la ration est de trois-quarts de litre.

 

V comme volontaires.- Il s'agit des jeunes volontaires qui furent enrôlés par la Croix rouge en août et septembre 1914. ces jeunes volontaires que j'ai retrouvé dans le Limousin étaient des lycéens et même pour certains (ils étaient rares) des étudiants. Les grandes vacances duraient alors jusqu'au début du mois d'octobre. Ces jeunes volontaires répondirent aux besoins de l'accueil des premiers convois de blessé qui en pleine bataille des frontières furent rapatriés vers le lointain arrière dans les hôpitaux auxiliaires, nombreux, ouvert notamment en Limousin.

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